Le moulin semble être
à l'articulation de la société, le "haut" et le
"bas" ne s'y rencontrent pas forcément, mais le meunier est
lié aux deux et tient des deux.
Les classes bourgeoise,
cléricale ou noble ont des droits au moulin tels que mouture
gratuite, mouture rapide ou mouture spéciale
(l'Encyclopédie ne distingue-t-elle pas mouture du riche, du
bourgeois et du pauvre ?), et la paysannerie attend du moulin sa
subsistance. Par son rôle économique et social, sa
fréquentation de la diversité sociale, le meunier
s'apparente aux dirigents : cependant, il est, et il reste, du
peuple, par sa naissance "ordinaire", son enfance et son adolescence
liées au travail, au moulin, mais aussi aux champs, à
la vigne, à la pêche, etc.
Il participe évidemment
à la "culture du peuple", bien qu'il sache, plus tôt que
le commun, signer, lire et écrire...
"Lorsque le système de la banalité se détend, le meunier reste cet artisan paticulier, il reste ce percepteur prélevant un salaire pour son service et l'entretien de sa machine, il est encore commerçant, achetant parfois des grains, les stockant, vendant la farine à ceux (artisans, commerçants) qui, n'étant pas paysans, ne récoltent pas de céréales ; il est parfois boulanger, si la coutume de cuire le pain au four a été abandonnée dans les fermes ; des toute façon, il a des rapports privilégiés avec les boulangers ruraux et urbains, et parfois, sans qu'il y ait de circulation monétaire visible ni de comptabilité apparente, il s'installe entre le blé et le pain, "entre le paysan et le boulanger", comme meunier échangiste. Ce système de troc ou d'échange survit dans certaines localités jusqu'à nos jours. C'est dire que, dans cette position-clé qui est la sienne, le meunier apparaît comme un "médiateur" : non au sens d'arbitre qui établit des médiations, des "arrangements", mais au sens d'intermédiaire privilégié.
Si la machine paraît faire
tout le travail ( Meunier,
tu dors... ), on sait en
réalité qu'il doit veuiller au bon état des
meules et des mécanismes, faire les réparations
d'urgence.
Mais par ailleurs, l'imagerie
populaire fair du Meunier un personnage à la malice
proverbiale et à la réputation de profiteur et de
voleur ; on trouvait dans de très nombreux moulins un miroir
placé près de l'entrée, là où le
meunier prélevait la mouture pour son usage et la
mrésence de ce miroir était un signal d'alarme pour le
Meunier, disait-on ; il se regardait dans la glace en se servant et
lorsque ses oreilles étaient devenues rouges, il savait qu'il
devait s'arrêter !